L'exode urbain est-il une réalité après les années Covid ?
Les confinements imposés aux Français en 2020 et 2021 durant la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 a mis en avant pour certains d’entre eux, surtout les habitants de grandes métropoles, les problèmes de manque de surface des logements, et les inconvénients à ne pas pouvoir disposer d’un extérieur pour prendre l’air en toute liberté. Tout de suite après la crise sanitaire, de nombreux médias notamment se sont fait l’écho d’un important exode urbain en cours, aidé notamment par le développement du télétravail alors imposé par le Covid. Qu’en est-il vraiment ? Les habitants des grandes villes sont-ils vraiment partis se mettre au vert ? La réalité semble être plus nuancée.
L’exode urbain après les années Covid : pas un phénomène massif
L’exode urbain, mis en avant en particulier par de nombreux médias suite aux mesures de confinement imposées durant la crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid, a-t-il vraiment eu lieu ? Les résultats d’une étude « Exode urbain : impacts de la pandémie de COVID-19 sur les mobilités résidentielles », réalisée à partir de juin 2021 par le Réseau Rural Français et le Plan Urbanisme Construction Architecture, modère le fait que de très nombreux Français auraient choisi de quitter les grandes villes pour la campagne, la mer ou la montagne suite à la crise sanitaire.
Les territoires concernés
Néanmoins, on constate que certains territoires ont bénéficié de l’arrivée d’habitants après les années Covid. D’abord, les villes petites ou moyennes (moins de 50 000 habitants) qui enregistrent un renforcement de leur solde migratoire, en leur faveur : 2,2 arrivées pour 1 000 ménages entre mars 2020 et mars 2021, contre 0,7 sur la période de mars 2019 à mars 2020.
De la même manière, les communes périurbaines (situées autour des pôles urbains) ont profité des départs de populations des centres urbains. Un phénomène en particulier marqué suite à la crise sanitaire à Paris où un certain nombre de ses habitants sont partis vivre dans les communes dites de « couronne ».
Les espaces ruraux, dont l’attractivité était déjà connue avant le Covid, ont bénéficié de l’arrivée de nouveaux habitants à la suite de la crise sanitaire. Leur solde migratoire est ainsi passé de 7,2 arrivées pour 1 000 ménages à 9,7. Toutefois, comme le souligne cette étude, tous les territoires ruraux n’ont pas bénéficié de la même manière de cet exode urbain. Ceux qui ont vu arriver une population venant des grandes villes sont en effet principalement des « campagnes urbaines », terme qui désigne des territoires « ni ville, ni campagne », mais où le lien entre agglomération et espace rural est présent, et des territoires qui présentent notamment des atouts d’accessibilité, économiques, et climatiques.
Comme le résument les auteurs de l’étude « Derrière l’expression "exode urbain" se cacherait donc un double malentendu : d’une part il n’est pas question ici d’un déferlement massif de populations "urbaines" dans les "campagnes", sorte de retour de bâton d’un exode rural qui aurait marqué les mobilités résidentielles au XXe siècle. D’autre part, les premières analyses invitent à saisir la diversité des territoires, y compris urbains : si départs de population il y a, ils sont loin de concerner toutes les catégories de villes ».
Les populations concernées par l’exode urbain
D’autre part, l’exode urbain annoncé à grand renfort de titres de presse après les années Covid, s’il a effectivement été renforcé, il ne concerne pas tous les Français, loin de là.
Quatre grandes de catégories de Français ont effet pu envisager de quitter les grandes villes suite à la crise sanitaire. D’abord, la population qui a bénéficié du télétravail et pour qui ce dispositif a été généralisé ensuite notamment. Il s’agit principalement de cadres supérieurs pour qui le fait de s’éloigner physiquement et en matière de temps de leur lieu de travail, et de s’installer dans des espaces ruraux ou dans des pôles urbains secondaires, est aujourd’hui possible sans que leur vie professionnelle en pâtisse.
Des ménages, qualifiés par cette étude comme ayant déjà un projet de « transition rurale » ou qui développent une nouvelle activité professionnelle principalement dans les domaines du bien-être, de la production agricole ou l’artisanat, sont aussi ceux qui ont profité de la crise sanitaire pour quitter les grandes villes. Des ménages souvent au capital culturel élevé, mais pas forcément avec un haut niveau de ressources qui fait craindre aux territoires qui les ont accueillis la non pérennité des activités de ces nouveaux arrivants.
Des populations à la recherche d’un mode de vie alternatif, quête accentuée avec la crise sanitaire, représentent également les profils qui en ont profité pour quitter les grandes métropoles, même si leur nombre n’est pas si conséquent.
Enfin, des retraités, ou des actifs proches de la fin de leur vie professionnelle, ont accéléré leur changement de vie après la crise sanitaire en se déplaçant plutôt vers des territoires au charme certain comme par exemple la Bretagne ou plus généralement la côte Atlantique, mais des territoires également dotés d’équipements sanitaires et médicaux. Toutefois, cette population garde le plus souvent son logement en ville et migre vers ces territoires pour y avoir une résidence secondaire.
Les années Covid ont accéléré un exode urbain déjà en cours
Toujours selon l’étude du Réseau Rural Français et du Plan Urbanisme Construction Architecture, la France d’après les années Covid reste toutefois marquée, comme avant la crise sanitaire, par l’attraction des pôles urbains, par la périurbanisation, c’est-à-dire une urbanisation dispersée autour des grandes villes et dans l’espace rural, et l’attractivité des communes du littoral.
Un phénomène et des tendances déjà à l’œuvre avant les années Covid. Ainsi, les grandes métropoles telles que Paris, Marseille, Lyon, Lille, Strasbourg, Grenoble, Toulouse, Bordeaux, Nantes, Rennes, Brest et Nice ont toujours la faveur des Français. Les grandes villes restent donc les territoires les plus recherchés et représentent ceux où les recherches de biens immobiliers sont toujours les plus nombreuses, où le marché de l’immobilier est donc en tension.
De la même manière, les communes des façades littorales, notamment bretonnes et basques, sont plébiscitées par ceux qui souhaitent déménager, les tensions de ces marchés immobiliers locaux en attestent. Une tendance qui date depuis longtemps déjà mais, il est vrai, qui a été renforcée avec la crise sanitaire.
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